Bilan

Journal de bord n° 9 - Bilan

Journal de bord n° 9 – Octobre 2021

Le programme CPER-DRAC Adapter le bâti ancien aux enjeux climatiques se terminera en septembre 2021. C’est donc l’occasion de revenir sur les objectifs de cette étude et les livrables de cette mission.

La Direction régionale des affaires culturelles souhaite soutenir la réhabilitation des bâtiments, et en particulier des bâtis de centres-bourgs protégés par des réglementations patrimoniales. Nous avions pour objectif de proposer un outil commun à toutes les structures partenaires (UDAP, CAUE, Espaces Conseil FAIRE, etc.) pour garantir une réhabilitation globale et cohérente, entre valorisation du patrimoine et performance thermique.

Objectifs du programme :

Le guide et l’ensemble de documents qui l’accompagne visent à défendre des compromis de moyens selon les trois facteurs suivants :

  • Améliorer la qualité énergétique du bâti ancien, en défendant des solutions de performance ;

Le bâti ancien, construit avant 1947 avec des matériaux biosourcés et géosourcés et des techniques traditionnelles, est pourvu d’un comportement thermique spécifique. Conçu selon des principes « bioclimatiques », il possède une logique de fonctionnement (thermique et hydrique) qui est aujourd’hui mise à mal par les rénovations nécessaires pour s’adapter aux usages contemporains.

Pourtant, le bâti ancien n’est pas le moins performant thermiquement. L’épaisseur des murs, la qualité des matériaux utilisés, mais aussi les décors intérieurs et l’intelligence de la culture constructive mise en œuvre en font des bâtiments dans lesquels il est agréable de vivre, et s’ils n’ont pas été modifiés, confortables en été.

Des améliorations sont effectivement à prévoir. Il est aujourd’hui nécessaire de réduire nos émissions liées à la production d’énergie primaire, et donc de moins chauffer et d’éviter de refroidir. Ces modifications doivent se faire avec comme objectif de résoudre les pathologies, de pérenniser le fonctionnement thermique et hydrique du bâtiment, et d’atteindre des objectifs de performance énergétique pour répondre au contexte de réchauffement climatique.

Voir le Fichier compagnon FC n2 – Interactions et travaux induits.

Voir les entrées du guide Cahier thématique et Approche globale.

  • Respecter des valeurs patrimoniales en préservant ses caractéristiques architecturales et esthétiques tout en assurant leur durabilité ;

Les centres anciens sont des espaces qui regroupent aujourd’hui des thématiques centrales d’attractivité, de rénovation et de préservation du patrimoine et de rénovation thermique. Les enjeux liés à la préservation du patrimoine sont loin d’être opposables aux logiques de performance. Au contraire, la performance peut être atteinte en comprenant précisément comment fonctionne thermiquement et hydriquement le bâti ancien, puis comment il est possible de l’adapter pour correspondre aux usages contemporains.

Le respect du bâti ancien passe donc d’abord par un travail essentiel de pédagogie, afin de comprendre ses caractéristiques et les valeurs historiques, mais aussi techniques, sociales et esthétiques qu’il possède. Une rénovation cohérente doit conserver, préserver et restaurer ces éléments remarquables, et le projet de rénovation doit prendre en compte ces spécificités et les intégrer. 

Voir le Fichier compagnon FC n5 – Éléments remarquables.

Voir l’entrée du guide Cahier typologique et Approche globale.  

  • Adapter les exigences de confort à l’usage du bâtiment et à la mise en valeur de ses qualités.

L’amélioration du confort du logement est, avec la perspective de réaliser des économies financières sur le long terme, l’un des leviers principaux pour amorcer une réhabilitation thermique performante. Le confort est une notion plurielle qui relève de l’interaction entre des critères architecturaux (qualité des espaces), thermiques (température ressentie, qualité de l’air intérieur, etc.), mais aussi ergonomiques (habitudes de vie, ergonomie des dispositifs mis en œuvre).

Garantir un confort passe par la prise en compte des comportements des usagers dans la conception. Au-delà des modèles thermiques définis par les logiciels de calcul ou la projection d’un usage du logement par un.e architecte ou un.e thermicien.ne, il faut considérer les comportements réels des occupant.e.s dans la modélisation. La connaissance de l’usage du bâtiment et des habitudes des occupant.e.s est primordiale : dans la phase amont du projet, et ensuite dans l’analyse de la consommation énergétique, puis dans les choix finaux du projet.

Une réflexion fine doit être menée afin de s’assurer que les solutions techniques proposées ne dénaturent pas les qualités architecturales du bâtiment et soient en adéquation avec les modes de vie des habitant.e.s tout en garantissant une performance thermique optimale. Des choix techniques ou constructifs inadaptés peuvent aboutir à des augmentations de factures imprévues ou à l'apparition d'un inconfort important dans le logement (sensation de paroi froide ou au contraire des surchauffes…). Une opération de réhabilitation est réussie si elle parvient à intégrer ces trois critères architecturaux, thermiques et ergonomiques harmonieusement !

Voir l’entrée du guide Le confort thermique au sein du logement.

Présentation des livrables

Le travail propose plusieurs livrables :

  • Le Guide Adapter le bâti ancien aux enjeux climatiques

Composé de quatre cahiers (approche globale, typologique, thématique, projet), il a été pensé comme un livre-objet manipulable par les structures partenaires. Il recense les bonnes pratiques d’une rénovation performante et respectueuse de son patrimoine et de l’environnement.

> Le guide est à destination des professionnels de la construction qui interagissent avec le grand public. La version papier a été créée pour les UDAP, il est également disponible pour les conseillers CAUE et Espaces Conseil FAIRE[1].
> Le guide sera accessible en ligne (DRAC, AJENA, CREBA ?).
[EP1] 

  • Les Fichiers compagnons

Afin de faciliter les échanges avec le grand public et de rendre la communication plus aisée, six Fichiers compagnons ont été créés. Sous forme de poster, ils reprennent et illustrent des problématiques clefs évoquées dans le guide.

> Les versions papier ont été créées pour les UDAP, les CAUE et les Espaces Conseil FAIRE.
> Les Fichiers compagnons seront accessibles en ligne[EP2] .

  • La note de recommandation

Elle a pour objectif de rappeler des thématiques essentielles pour obtenir une performance thermique optimale dans le respect du patrimoine. La note est à destination des UDAP et des agences d’architecture et d’urbanisme qui rédigent les PSMV et les PVAP.

         > La note de recommandation est exclusivement à destination de la DRAC et des UDAP et leur a été transmise en version numérique.

  • Le Journal de bord

Entre janvier et septembre 2021, c’est huit entrées de Journal de bord qui ont été rédigées, et qui sont venues rendre compte de l’avancée du travail, mais aussi à travers des dossiers thématiques, d’approches spécifiques, comme le programme de revitalisation des centres-bourgs, ou encore la question de pathologies humides dans le bâti ancien.

> Disponible en format numérique sur le site de l’AJENA, rubrique « Bâti ancien ». Il sera également possible de télécharger un document PDF regroupant toutes les entrées dans un seul document.

Pour aller plus loin...

La mission Adapter le bâti ancien a permis de mettre en évidence certaines actions qu’il serait pertinent de mener et de mettre en œuvre.

  • Encourager la sensibilisation du grand public sur le bâti ancien, tant sur le plan thermique qu’architectural. Des actions de sensibilisation doivent continuer à être menées et accompagnées par des architectes, qui sont les plus qualifiés pour défendre l’approche globale.
  • Systématiser le retour d’expérience dans les réseaux de bâti ancien (CREBA), bâtiment durable, Effilogis, et contribuer à mettre en avant des démarches exemplaires. Celles-ci ne doivent pas uniquement être tributaires d’une bonne performance énergétique, mais défendre une logique responsable de la réhabilitation et la défense de la cohérence architecturale. Les retours d’expérience doivent s’accompagner le plus possible de campagne d’instrumentation et de diagnostic complet.
  • Réaliser des campagnes d’instrumentation pour réaliser des diagnostics complets de bâtiments types, ce qui comprend des relevés, diagnostics sanitaires complets, diagnostics thermiques avec instrumentation sur 1 an, relevés des éléments remarquables. Ces démarches permettront d’acquérir des connaissances supplémentaires sur les comportements des bâtis anciens et donc proposer des démarches exemplaires de réhabilitation.
  • Encourager les études patrimoniales et le référencement des éléments remarquables du patrimoine 1947-1974. C’est le plus concerné par les opérations de rénovation car c’est le plus énergivore. C’est un patrimoine riche, qui mérite d’être identifié et valorisé. Il répond à d’autres problématiques, car il correspond à un autre contexte social, technique et historique.

Bilan 

Au cours de l’étude, des différents échanges et de l’enquête, nous avons pu construire un état de la connaissance des thématiques de la rénovation. Certains sujets qui ont été abordés en annexe (comme les pathologies) pourraient à eux seuls constituer une étude.

Cette mission a également permis de mettre en évidence le chemin qu’il reste à parcourir, et des actions qu’il faut continuer à encourager.

  • Un besoin de formation sur tous les aspects du bâti ancien

Le premier point qui apparaît prioritaire dans le sujet est l’imprécision des connaissances sur le sujet et la diversité des points de vue. Les professionnels formés à la réhabilitation sont encore trop peu nombreux, ce qui peut mener parfois à des transformations inadaptées. Le besoin de formation apparaît donc comme essentiel pour tous :

  • Sur l’importance du diagnostic et du traitement des pathologies ;
  • Sur l’importance d’une approche globale ;
  • Sur les besoins techniques spécifiques ;
  • Sur les éléments remarquables qu’il convient de protéger.

Il est important de différencier les formations à la construction des formations à la rénovation/réhabilitation.

  • La nécessité de coordination entre les différents acteurs

Le paysage des accompagnateurs de la rénovation est aujourd’hui saturé. En plus de la nécessité de sensibiliser et former les conseillers, il est important de renforcer la coordination et la complémentarité entre les CAUE (qui possèdent la compétence architecturale et de conduite de projet) et les Espaces Conseil FAIRE (formés à la performance thermique et aux aides financières).

Des actions sont déjà menées dans ce sens : le CAUE et l’Espace Conseil FAIRE du 71 proposent ainsi des rendez-vous avec deux conseillers. Des sensibilisations sont donc nécessaires pour construire une vigilance autour du bâti ancien et de ses qualités.

  • La défense de l’approche globale de la rénovation

L’importance de l’approche globale n’est plus à démontrer : pour obtenir une rénovation performante, il faut limiter les travaux par étape, afin de pouvoir gérer correctement les interfaces et les points singuliers, et espérer atteindre des niveaux de performance certifiés (comme BBC Rénovation). Au-delà, la vision globale permet d’assurer la cohérence du projet, et de prendre en compte toutes les particularités du bâtiment.

En encourageant des démarches ambitieuses et complètes dans la rénovation, le rôle de l’architecte devient central et essentiel pour coordonner les différentes entreprises et s’assurer de la cohérence du projet depuis les diagnostics jusqu’à la livraison.

Cette approche générale doit être accompagnée de diagnostics précis (sanitaires, architecturaux et thermiques). Ces diagnostics et compétences de maîtrise d’œuvre restent néanmoins des dépenses supplémentaires et sont encore peu considérés dans les aides et subventions de l’État.

  • Une vision transcalaire du projet

L’adaptation du bâti ancien pose des questions de performance thermique durant l’été, en particulier en vue de l’augmentation des vagues de chaleur précoces et des épisodes caniculaires. Le confort d’été, pour lequel les bâtis anciens – dans la mesure où leur fonctionnement respecte les concepts bioclimatiques sur lesquels ils ont été conçus – possèdent des avantages certains. Les politiques urbaines et d’aménagement doivent prendre en compte ces problématiques et les intégrer dans les documents d’urbanisme (exemple : PSMV de Nantes, AVAP/PSMV de Joinville…). De telles démarches commencent déjà à se mettre en place et doivent être encouragées à toutes les échelles.