Journal de bord n°3 - Revitalisation des Centres-Bourgs - Quels enjeux pour la rénovation énergétique et patrimoniale ?
Lancée en 2014, l’expérimentation « Revitalisation des centres-bourgs » a permis à 54 communes de moins de 10 000 habitants de « construire et mettre en œuvre un projet de revitalisation fondé sur leurs atouts spécifiques et visant à améliorer le cadre de vie des habitants. »
En Bourgogne-Franche-Comté, cinq projets ont été retenus : Montbard, Salins-les-Bains, Tournus, Avallon et Giromagny. C’est l’ANAH qui est chargée de la « mise en œuvre opérationnelle et du suivi des opérations de revitalisation. »
Nous avons choisi de faire un retour d’expérience afin de comprendre comment des actions concrètes et globales permettent d’agir sur des tissus urbains dégradés, et ainsi défendre des actions globales de réhabilitation. Nous avons donc sollicité Catherine Simon, chargée d’opération chez URBAM Conseil, cabinet privé et opérateur ANAH sur le programme de revitalisation à Giromagny.
Le programme de revitalisation de Giromagny
a) Présentation de la commune
La commune de Giromagny est située à 13 km de Belfort, et est le siège de la communauté de communes des Vosges du Sud. Petite ville, elle possède un patrimoine lié à la métallurgie, aux mines, aux scieries et au textile. Elle possède plusieurs monuments historiques : son fort (inscrit), et le Monument commémoratif de la réunion de l’Alsace à la France (classé).
b) Présentation de l’opération
Le projet de revitalisation s’est mis en place le 28 avril 2016, avec la signature de la convention marquant le départ de l’opération programmée d’amélioration de l’habitat (OPAH).La phase opérationnelle a commencé en octobre 2016, avec pour objectifs les axes suivants :
- « La lutte contre l’habitat indigne, dégradé et non décent,
- L’adaptation des logements aux handicaps ou au maintien à domicile,
- La lutte contre la précarité énergétique en permettant une amélioration des logements,
- La résorption de la vacance et la mise sur le marché des logements à loyers maîtrisés. »
La mission a une durée de six ans et prendra fin en 2022.
Interview de Catherine Simon – URBAM Conseil
Ajena : Quel a été le rôle d’URBAM Conseil dans le cadre de la démarche de l’OPAH ?
Catherine Simon : URBAM Conseil a été missionné pour accompagner la collectivité et ses administrés lors des demandes de subventions incluses dans le périmètre de l’OPAH-Revitalisation urbaine de la commune de Giromagny. Il s’agissait de mettre en place une démarche d’animation et d’accompagnement des projets, des premières interrogations jusqu’à la fin du chantier. Les chargés d’opération s’assurent de la bonne composition du dossier, et peuvent assister les maîtres d’ouvrage lors de la sollicitation puis lors de la relecture des devis.
A. : En quoi ce rôle est-il différent de celui d’un Espace Conseil France Rénov (ECFR) ?
C. S. : La mission d’URBAM Conseil peut être assimilée à celle d’un guichet unique, au même titre que les ECFR. Cette mission peut également être complémentaire de celle des ECFR, qui constituent parfois le premier jalon dans le parcours de rénovation. Lorsque l’entrée est l’ECFR, celui-ci redirige ensuite les particuliers vers URBAM Conseil s’ils entrent dans les critères de l’OPAH. Si la première entrée passe plutôt par l’opérateur, celui-ci peut orienter le propriétaire vers l’ECFR pour les projets les plus ambitieux qui continueront vers le programme BBC-Effilogis de la région. C’est un travail partenarial.
Ce suivi permet d’avoir un parcours accompagné dans le cadre de l’OPAH. Ce lien est important, car il permet de rassurer les particuliers, participe à la création d’un lien de confiance et au suivi des projets.
A. : Pourquoi la mise en place d’une OPAH est-elle importante dans ce contexte ?
C. S. : La mise en place d’un dispositif tel que l’OPAH trouve tout son sens dans un contexte rural, qui ne bénéficie pas nécessairement des outils ou des supports techniques pour accompagner leurs administrés dans leurs démarches. Les espaces de conseil permettent de mettre à disposition des « sachants », qui disposent de tous les outils pour mener à bien leur mission. Il s’agit de mettre en place un cadre incitatif qui accompagne la prise de décision. La pédagogie est vraiment centrale dans ce type d’accompagnement.
L’OPAH est une opération globale : avec des phases de communication, des partenaires identifiés qui font le lien. Cela permet de construire une relation de confiance avec les administrés. Il n’y a pas « d’actions détachées », et c’est la vraie force du projet. Sur le secteur, les administrés connaissent les intervenants et leur font confiance. Les multiples campagnes de communication et la constance de l’information (articles dans les bulletins communaux et journaux locaux), permettent de faire exister la démarche aux yeux des administrés et de leur donner confiance, en particulier à travers des exemples. Ensuite, le fait que la démarche soit gratuite et sans engagement facilite les rapports.
A. : De quelles aides financières peuvent bénéficier les propriétaires ?
C. S. : En plus des subventions classiques, la mairie de Giromagny octroie des aides supplémentaires pour les projets situés dans le périmètre privilégié de l’OPAH. Cela concerne les ravalements ou la remise en location d’un logement vacant.
A. : Quelles sont les spécificités propres aux centres-bourgs que vous avez rencontrées ?
C. S. : La question de la performance énergétique est centrale, et s’accompagne d’autres problématiques liées plus spécifiquement aux habitats des centres-bourgs, en particulier ce qui relève du maintien à domicile et la remise en état des logements vacants en vue d’une remise sur le marché de la location. Ce point en particulier est un enjeu spécifique dans ce type de centre-bourg, car les logements vacants sont très dégradés.
A. : Comment se passe la démarche dans le cadre d’un bâti ancien ou d’un abord de monument historique ?
C. S. : L’accompagnement doit se faire en proposant des solutions bien adaptées à ce type de bâtiment : la pose d’une ITE est par exemple de facto impossible. Notre rôle est aussi d’accompagner le projet lors des rencontres avec les ABF. D’une manière générale, les contraintes sont plutôt bien acceptées : les propriétaires occupants sont très guidés dans leurs actions, et dans le cas des bailleurs privés, ils sont sensibilisés à ces questions. La présence d’un architecte et d’une équipe de maîtrise d’œuvre permet également de fluidifier les discours. Récemment, URBAM Conseil a ainsi pu accompagner deux projets de logements conventionnés à loyer social ou intermédiaire dans ses allers-retours avec les services d’urbanisme.
A. : Après cinq ans d’expérimentation, quel est le retour d’expérience ?
C. S. : Il est très encourageant ! Aujourd’hui, nous avons accompagné 116 projets sur un objectif de 180. Avant 2016, il y avait peu de dossiers déposés. C’est pour nous la preuve que l’accompagnement est essentiel. Tout le monde est satisfait du résultat actuel.
La démarche fonctionne très bien pour les propriétaires occupants, mais nous avons deux configurations qui sont un peu moins évidentes à gérer.
Premièrement, il y a le cas du locatif et les logements vacants qui ont du mal à être remis sur le marché, même si cette année plusieurs projets de bailleurs ont été déposés. Cela représente maintenant un total de 15 logements depuis le début de l’OPAH et ces projets se poursuivent avec l’émergence d’autres dossiers. Il ne faut pas oublier que sur ce type d’opérations, les démarches sont souvent plus longues (temps de la vente, etc.).
Deuxièmement, il existe le cas des propriétaires de logements insalubres et en grande précarité. Ces derniers ne se signalent pas, et il est donc compliqué de les identifier. Des partenariats spécifiques sont mis en place avec les élus du CCAS 70 afin de mettre en place et poursuivre ses actions spécifiques.
Source 1 : https://www.ecologie.gouv.fr/territoires - Retour
Source 2 : https://www.centres-bourgs.logement.gouv.fr/la-demarche-r8.html - Retour
Source 3 : https://www.giromagny.fr/presentation.htm. - Retour
Source 4 : Op.cit. - Retour