Contexte et enjeux de la rénovation 
du bâti des centres anciens

Journal de bord n°1 - Contexte et enjeux de la rénovation du bâti des centres anciens

Journal de bord n°1 – Décembre 2020   
1 Photographie du Centre-ville de Besançon - Licence Pixabay

La rénovation des bâtiments en France est un enjeu important du fait des engagements climatiques prit au niveau mondial et européen.

En Bourgogne Franche-Comté, la Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC) souhaite soutenir la réhabilitation des bâtiments, plus spécifiquement celle des centres anciens. En effet, des exigences spécifiques s’appliquent à ce patrimoine vernaculaire qui façonne l’image de nos cœurs de villes.

Qu’ils appartiennent aux monuments historiques, qu’ils soient soumis à des règles d’urbanismes spécifiques, ou bien répondent seulement à des objectifs de performance énergétique, les choix de réhabilitation pour chaque bâti sont orientés par le contexte réglementaire ; entre préservation du patrimoine et exigences thermiques.
Aujourd’hui, il est important de développer et mettre en place des méthodes d’approche globale pour la réhabilitation de ces typologies spécifiques, afin de continuer à habiter confortablement notre patrimoine.

C’est dans ces dispositions que la DRAC a missionné l’association AJENA pour animer le programme Adapter le bâti ancien aux enjeux climatiques sur le territoire de Bourgogne Franche-Comté. L’enjeu du programme est de trouver un terrain d’entente entre performance thermique du bâtiment et valorisation urbaine patrimoniale.

Le contexte législatif de rénovation du parc bâti en France 

C’est avec les premiers chocs pétroliers des années 70 que se mettent progressivement en place en France des réglementations thermiques (RT). Ces textes successifs définissent des objectifs chiffrés sur les performances minimums que doivent atteindre les constructions neuves. 

Conscient du poids du bâtiment sur la production de Gaz à Effet de Serre (GES), et sur de la consommation de carbone, c’est à partir des années 2000 que des réflexions se mettent en place afin d’intégrer les bâtiments existants dans l’arsenal législatif. Ainsi, en 2007, le Grenelle de l’environnement fixe comme objectif 400 000 rénovations lourdes par an. Puis, votée en août 2015, la loi de Transition Énergétique pour la Croissance Verte pose comme nouvelle ambition la rénovation de 500 000 logements à partir de 2017, et la suppression des passoires thermiques d’ici 2025.

Ce dernier objectif en particulier est réaffirmé dans la Loi Énergie Climat du 8 novembre 2019, avec de nouvelles contraintes en cas de vente ou de location d’un bien.En complément, la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC), révisée en 2019, aspire à la neutralité carbone d’ici 2050.
Aujourd’hui, la Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE) s’adapte aux bâtiments existants en proposant un plan de rénovation énergétique. Il propose aux professionnels du secteur de travailler sous la bannière FAIRE et remodèle les aides financières pour la rénovation, notamment à destination des ménages les plus modestes.

Cependant, comme indiqué précédemment, la réglementation thermique et ses obligations ne s’appliquent que rarement au bâti d’avant 1948 et aux centres-bourgs. En effet, d’une part ces bâtiments regroupent des problématiques spécifiques du fait de leurs techniques constructives et des matériaux employés. D’autre part, leur position - en zone urbaine - les soumets à des contraintes spécifiques liées à la protection du patrimoine (PVAP, Secteurs sauvegardé, Monuments historiques…)    
Ces paramètres rendent chaque bâtiment unique et soumis à une adaptation précise des choix de rénovation pour maintenir la cohérence du projet. Ces contraintes semblent s’opposer aux politiques actuelles de performances énergétiques du parc bâti en France. A l’heure de l’accélération de la transition écologique, il est nécessaire d’étendre l’efficience énergétique à tous ces bâtis. Nous participons ainsi à la recherche de solutions pour la valorisation et à la pérennité de nos centres anciens.

Les spécificités du bâti ancien et des centres-bourgs

La création d’un principe de rénovation universelle pour le bâti ancien des centres-bourgs est utopique, tant les spécificités régionales - voir départementales - et les techniques constructives sont nombreuses. Afin de tenir compte de la richesse du bâti, il est nécessaire dans un premier temps de définir les typologies constructives et architecturales les plus répandues dans les centres-bourgs de Bourgogne Franche-Comté, puis de développer une méthode d’approche et de réflexion globale qui comprend plusieurs scénarii possibles de rénovation.

2 Carte de l’état-major 1820 -1860 Besançon – Géoportail Carte de l’état-major

Le bâtiment dit "ancien", fait référence à un parc bâti vernaculaire datant d’avant 1948, c’est-à-dire avant le début de l’industrialisation des procédés de construction. Ce bâti est construit avec des techniques et des matériaux traditionnels et locaux, comme les pierres de taille, les moellons, les pans de bois ou le pisé. Ils présentent des propriétés intrinsèques, liées à l’utilisation de matériaux aux caractéristiques multiples, et un comportement thermique spécifique qui sont à la fois la force et la faiblesse de ces édifices : peu ou pas d’isolation, une forte inertie, ventilation naturelle, menuiseries en bois simple vitrage...

Aujourd’hui, ces points peuvent être source d’inconfort pour les occupants, en particulier si les systèmes de chauffage et les usages ne sont plus en phase avec le fonctionnement initial du bâti par exemple. En parallèle, ce sont ces mêmes éléments (murs en pierre de taille, modénature des fenêtres, corniches, fenêtre à meneaux,) qui font le charisme de l’ancien et participent à conserver la mémoire historique des centres-villes.

Les bâtiments anciens constituent encore 38% du parc bâti à rénover, dont un tiers de logements collectifs. Ils sont soumis, dans les centres, aux règles des Plan Local d’Urbanisme (PLU) et des Plan de Sauvegarde et de Mise en Valeur (PSMV). Ces derniers en particulier, sont garant du respect du patrimoine et de la conservation du cadre urbain et architectural dans les secteurs sauvegardés. Ils sont élaborés conjointement par l’État et la collectivité et proposent un classement des bâtiments, entre patrimoine remarquable et construction d’intérêt secondaire. Ils définissent ainsi les possibilités d’interventions, tout en permettant des évolutions au regard des fonctions urbaines contemporaines. 

Les compromis entre réhabilitation et conservation

La réhabilitation du bâti ancien – maison, immeuble ou appartement - représente un challenge spécifique par les interactions parfois contradictoires entre sauvegarde patrimoniale, performance thermique et usage contemporain. Ainsi, la rénovation des centres-villes historiques revêt un double enjeu : à la fois contribuer à la préservation d’un esprit architectural, mais aussi s’engager pour diminuer les consommations et les émissions de CO2 et améliorer le confort d’été et d’hiver.

De plus, la rénovation de ces centres bénéficiera à la dynamique urbaine grâce une recentralisation de la vie locale en opposition à un étalement urbain. 

Et enfin, moins énergivore et moins consommatrice de matières premières, la rénovation permet également de valoriser les savoir-faire des artisans locaux. 

C’est dans ce contexte qu'Ajena travaille depuis 2019 en collaboration avec la DRAC Bourgogne Franche-Comté sur le programme d’adaptation du bâti ancien.  

En parallèle de ce programme, la mise à jour du PSMV de la ville de Besançon (quartier Battant et Centre-ville) offre l’opportunité d’intégrer des réflexions conjointes et cohérentes avec la politique urbaine de la ville. Pour répondre à cette opportunité, le programme vise l’étude d’un îlot spécifique dans un quartier en cours d’examen par les urbanistes. Cette mécanique pourrait prendre en compte à la fois le volet architectural, le volet thermique et permettre d’identifier les points singuliers dans la rénovation. 

Nous souhaitons ainsi faciliter l’approche de la rénovation en explicitant ses problématiques particulières en cœur d’îlot, en proposant des alternatives compatibles avec les exigences patrimoniales et de construction durable, tout en préservant les spécificités architecturales et les savoir-faire de la région. 

Le développement du programme

Le programme Adapter le bâti ancien aux enjeux climatiques s’attèle dans un premier temps à réaliser un état des lieux des typologies des bâtiments de centre-bourg en Bourgogne Franche-Comté.

Ensuite, il est prévu de proposer pour chaque typologie, des solutions de rénovation répondant à la diversité des situations et au traitement des singularités.

L’objectif final est d’apporter des outils aux prescripteurs et acteurs de la rénovation et de la conservation du patrimoine comme par exemple les structures de conseils (CAUE, ECFR…).

Dans le cadre de la conservation du patrimoine, le programme cherche finalement à promouvoir des solutions viables autant d’un point de vue thermique que patrimonial et à amplifier leur mise en œuvre à moyen terme. 

Dans un second temps, le programme va se déployer afin de traiter de l’architecture remarquable du XXème siècle. Trop souvent oublié, le patrimoine 1948-1974 regroupe des bâtiments singuliers, avec des spécificités architecturales et de mise en œuvre. Ils appellent eux aussi à une rénovation qui soit adaptée à leur typologie et leur fonctionnement. 

1 Vernaculaire : « architecture sans architecte », constructions faite à partir de matériaux et de savoir-faire locaux, sans apport d’un « sachant » - Retour 

2 Pour rappel, le secteur du bâtiment représente 26% des émissions de CO- Retour

3 LOI n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte - legifrance.gouv.fr - Retour

4 Logement dont la consommation énergétique relève des classes F et G (https://www.ecologie.gouv.fr/loi-energie-climat) - Retour

5 Loi n°2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat : https://www.ecologie.gouv.fr/loi-energie-climat - Retour

6 Ministère de la Transition Écologique, Stratégie Nationale bas Carbone, https://www.ecologie.gouv.fr/strategie-nationale-bas-carbone-snbc - Retour

7 Voir https://france-renov.gouv.fr - Retour

8 PSMV : Plan de sauvegarde et de mise en valeur : Le dossier du PSMV, comme tout document d’urbanisme, se compose d’un Rapport de présentation et des pièces réglementaires listées ci-dessous. Les pièces réglementaires sont constituées d’éléments écrits et d’éléments graphiques, il s’agit :

  • du présent Règlement : Dispositions générales, Dispositions particulières en trois sections, et pièces complémentaires,
  • du Plan réglementaire, sous la forme d’un plan PSMV : Plan de sauvegarde et de mise en valeur : Le dossier du PSMV, comme tout document d’urbanisme, se compose d’un Rapport de présentation et des pièces réglementaires listées ci-dessous. Les pièces réglementaires sont constituées d’éléments écrits et d’éléments graphiques, il s’agit :
  • du présent Règlement : Dispositions générales, Dispositions particulières en trois sections, et pièces complémentaires,
  • du Plan réglementaire, sous la forme d’un plan - Retour

9 Code de l’urbanisme Article L313-1. Au sein d’une Aire de Mise en Valeur de l’Architecture et du Patrimoine (AMAP), les PSMV se substituent aux PLU, et remplacent l’ancienne règles des abords des Monuments Historique pour favoriser une approche globale et une protection des bâtis non protégés au titre des Monuments Historiques. - Retour